Nouveau succès pour Beerdays, ce week-end à Rouen [REPORTAGE]

© Bière Actu

C’est le dernier grand rendez-vous de la saison avant la trêve hivernale : Beerdays a refermé ses portes hier soir. Et cette année encore, son succès ne se dément pas.

La quatrième édition de Beerdays, couplée au Salon Gourmand, a encore rencontré un franc succès cette année, au Parc des expositions de Rouen (Le Grand-Quevilly, 76). Si vendredi la fréquentation était plutôt moribonde (rappelons que ce n’était pas un jour chômé, contrairement à l’an dernier), samedi et dimanches étaient bien plus dynamiques. Au global, les deux rendez-vous ont attiré quelques 38 000 visiteurs (+ 26 % vs. 2022), annonce l’organisateur, Rouen Expo Evénements.

La quarantaine de brasseries annoncées n’était pas au rendez-vous. Il y avait plutôt une trentaine de stands. La conjoncture actuelle contraignant les petits producteurs à rester vigilants sur leurs dépenses. Ceux qui étaient là ont fait l’effort, ou pris le pari d’au moins rentrer dans leurs frais. Dimanche matin, à l’ouverture, Laurent Dutheil n’avait plus grand chose à servir aux visiteurs tellement la journée de samedi avait été bonne. Venu de Mur-sur-Allier (63), le fondateur de la Brasserie Billd revenait pour la deuxième fois au Beerdays. « J’ai cinq heures de route, mais j’aurai vite chargé la voiture puisque j’ai tout vendu » , se réjouit-il. Sur le stand de Malheur, David Dégardin, commercial de la brasserie belge en France ne savait plus où donner de la tête, samedi en fin de journée. Sur chacun de ses quatre becs, il changeait le fût toutes les heures. Au final, les brasseries ont un peu de mal à accorder leurs violons. Certaines ont bien fonctionné. D’autres moins bien, reportant la responsabilité sur l’emplacement ou la météo.

Toutes avaient, plus ou moins, des nouveautés à présenter au public. Certaines, parce que c’était leur première participation à Beerdays, comme la Brasserie Grand Duc à Sormery (89). Dimitri Opotchinski et sa compagne Aurélie Ponti, ont créé la brasserie en 2019. Toutes leur bières sont Bio et la plupart sont des styles natures (Pale Ale, Blonde belge, Red IPA, IPA Saison, Triple, Weizenbier, Imperial Stout). Mais le couple produit aussi des bières avec ajouts, à condition qu’il y ait un sens. La bière au pain a été élaborée avec les restes de pain de leur boulanger, la Berliner weisse au kiwano a été élaborée avec les fruits d’un maraîcher voisin qui fait de la réinsertion par le travail où la Witbier tomate blush/basilic citron (5 % alc/vol), dernière création de la brasserie. Pour le vieillissement en barrique (un Imperial Stout et deux fermentations mixtes), les tonneaux proviennent de vignerons installés tout près de la brasserie. Ainsi, la Brasserie Grand Duc élève ses bières dans une cave comptant 20 pièces bourguignonnes (tonneau de 228 l).

Les brasseries normandes aussi étaient à la fête, comme la brasserie Bioterre qui, huit mois après son déménagement d’Alençon (61) à Villers-Bocage (14), se réjouit du succès de son nouveau brewpub Bouchon et Houblon. François Bolanos s’est associé avec Stéphane Petit, négociant en vins et spiritueux et principal distributeur de la brasserie. « Beerdays, c’est pour nous faire connaître, explique-t-il. Je viens depuis le début et c’est le seul salon que je fais, pour l’instant. D’année en année on retrouve nos clients, l’ambiance, les collègues brasseurs qu’on n’a pas l’occasion de voir souvent et cela permet de goûter leurs produits, lancer des collabs… » En 2023, la brasserie Bioterre aura produit 1 200 HL sur son installation de 10 HL en tanks à lait. Jusqu’ici, la brasserie conditionnait exclusivement en bouteille mais est en train d’acheter ses premiers fûts pour se développer sur le marché CHR. « Nous avons une gamme très classique avec une Blonde, une Triple, une Quadruple, une IPA, une DIPA, un Stout et une bière aux fruits rouges griotte, mûre sauvage et myrtille, poursuit François Bolanos. J’ai une forte attirance pour le style belge, même si je brasse à l’anglaise, en monopalier. » Issu de la restauration, paysan-cuisinier depuis 2009, le brasseur est passionné pour la bière depuis de longues années. « Comme beaucoup de choses dans ma vie, j’ai voulu le faire moi-même » , dit-il en levant son verre.

Dans l’Eure (27), à Bernay Flavien Perdriel est agriculteur-brasseur. En 2019, le quadragénaire a co-fondé, avec deux autres agriculteurs et un ingénieur agronome, La Quart’Ouche. Ils cultivent leur orge qu’ils font ensuite malter à Bayeux (14). Cette année, la brasserie a produit 700 HL, essentiellement pour sa gamme traditionnelle Quart’Ouche, distribuée notamment en GMS. Mais à Beerdays, La Quart’Ouche est venue lancer sa nouvelle gamme Svölnir, une gamme plus craft, destinée spécifiquement aux réseaux CHR et cavistes, élaborée en partenariat avec Christèle Zamprogno, propriétaire de la cave BeerZ, à Cherbourg-en-Cotentin (50). L’objectif est de proposer deux nouvelles bières éphémères tous les quatre mois, soit six nouvelles références par an. Pour lancer cette nouvelle gamme Svölnir, deux bières étaient proposées à la dégustation : Skadi (4 % alc/vol), une Saison mirabelle tonka et Hálogi (6 % alc/vol), un Porter fumé, pimenté et boisé. La nouvelle gamme est produite en brassins uniques de 10 HL, dont la moitié est conditionnée en fût et l’autre, el bouteille 33 cl.

Autre brasserie née avant l’épidémie de Covid-19 : la brasserie Sagesse. Nicolas Vieillard l’a fondée en 2014 à Maison-Lafitte (78). C’était même l’une des première brasseries du renouveau brassicole en Île-de-France, avec d’autres comme la brasserie de l’Être, par exemple. Elle déménage en Nordmandie en 2018, pour s’installer au Breuil-en-Auge (14), entre Pont-L’Evêque et Lisieux, dans une ancienne menuiserie où Nicolas Vieillard a aménagé son habitation et sa brasserie. Aux beaux jours, l’extérieur de 200 m² permet d’accueillir la clientèle nombreuse, dans le petit village d’un millier d’habitants. « Nous avons organisé cette année notre premier Octobreuil Fest, explique Nicolas Vieillard. Nous avons accueilli 300 personnes ! » Brasseur amateur depuis 1999, il a parfait ses connaissances en 2003 à l’IFBM. En 2023, il a produit 500 HL de bière Bio, dont la fameuse Peine de mort (8 % alc/vol), une Imperial IPA au piment habanero. « Nous n’aurions jamais dû la créer, sourit le brasseur. Nous avons converti toute notre clientèle ! » , même si le premier volume de la brasserie reste la Blonde. « Ma deuxième passion, c’est le bois, poursuit-il. Nous sommes au cœur de la zone de production du Calvados. Nous avons aménagé un petit chai d’une quinzaine de barriques de Calvados et de vin. » Sa gamme de bières barriquées, baptisée An’ARTiste, a été lancée en 2021. Nous avons pu découvrir La part des anges (9,5 % alc/vol), un Porter vieilli 10 mois en barrique de whisky tourbé venue des Etats-Unis et passée par le chai de la distillerie du Château du Breuil. Et parmi les projets du brasseur : laisser vieillir sa Peine de mort en barrique de Téquila.

Pour terminer notre visite à Beerdays, arrêtons-nous devant le superbe beer-truck de Julien Dubuc et Sébastien Linant. Ils viennent de lancer Wheel’s & Beer, en juin dernier. On pourrait croire qu’ils sont père et fils. Ils précisent très vite qu’ils se sont rencontrés dans la concession moto où Sébastien Linant travaillait depuis des années. « On aime la bière et les véhicules américains tous les deux, explique Julien Dubuc. J’ai découvert le concept du beer-truck en 2016 aux Etats-Unis et je m’étais dit que si un jour l’occasion se présentait, je me lancerai. J’ai passé quatre ans aux Etats-Unis avant de rentrer et de rencontrer Sébastien. Nous avons discuté le 14 novembre 2022 et avons animé notre premier événement le 2 juin 2023. Ca a été assez rapide ! » Leur beer-truck, c’est un GMC Vandura, le même véhicule que celui de l’Agence tous risques ! Deux ans plus tôt, ce même véhicule était celui d’un plombier de Los Angeles. « Le plus compliqué, ca a été l’aménagement intérieur, précise Sébastien Linant. Il a quand même fallu percer la carrosserie pour installer les quatre becs. Mais à l’intérieur, il y a deux blocs froid. » Depuis le mois de juin, les deux associés ont travaillé tous les week-ends sur des événements. En semaine, aussi, pour des événements d’entreprise et autres afterworks. « L’idée c’est de proposer de la bière artisanale sur différents événements : foires, marchés, événements professionnels, souligne Sébastien Linant. Nous avons fait le Freedom Tour, à Saint-Jean-du-Cardonnay, qui est le plus gros événement de la concession Harley Davidson de Rouen. Pour le moment nous travaillons beaucoup dans la région, mais nous sommes prêts à nous déplacer. » S’ils ne sont pas brasseurs, Julien Dubuc et Sébastien Linant veulent représenter les brasseries qi leur feront confiance, comme la Brasserie du Zink ou la Brasserie de Sutter, également présente à Beerdays cette année.