« La bière devrait définitivement devenir plus chère » , estime le président des brasseurs bavarois

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Alors que les prévisions de l’Office fédéral de la statistique ne prévoient pas d’embellie cette année pour la filière brassicole allemande, Georg Schneider affirme que le travail des brasseries n’est plus valorisé.

Dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas : le président de l’Association des brasseurs bavarois, Georg Schneider, s’y est risqué dans un entretien au quotidien régional allemand Augsburger Allgemeine, paru mardi. Sixième Schneider à porter le prénom de Georg depuis la création de la brasserie Schneider Weisse G. Schneider & Sohn GmbH en 1872 à Munich (DE) – puis reconstruite à Kelheim (DE) après sa destruction durant la Seconde Guerre mondiale – Georg Schneider se fait le porte-parole des brasseries de taille moyenne qui ne parviennent pas à rivaliser face aux rouleaux compresseurs industriels qui dictent les prix sur le marché. Selon Georg Schneider, quatre grosses brasseries forment un oligopole qui dicte les prix. Le président des brasseurs bavarois regrette également que les petites brasseries soient soumises aux mêmes contraintes administratives que celles que les grands groupes industriels qui emploient des milliers de personnes. « Certains brasseurs pourraient en arriver à la conclusion suivante : soit je risque consciemment d’aller en prison parce que je ne peux tout simplement pas respecter toutes ces règles bureaucratiques par manque de temps et de personnel, soit je respecte toutes les exigences mais j’arrête de travailler » , déplore Georg Schneider.

Réputée pour sa production de Weizenbier (bières de blé), Schneider & Sohn vend notamment ses bières au Weisses Bräuhaus (Munich) où le prix ne dépasse pas 5 € le litre. « Nous ne voulons pas être les moins chers du centre-ville, mais nous ne voulons pas non plus être les plus chers » , explique Georg Schneider. Sur un événement comme l’Oktoberfest (où la bière est servie en chope de 1 L), elle est vendue plus cher : « Je ne pense pas que 15 euros pour une bière à l’Oktoberfest soit obscène, car lorsqu’on achète une bière, on paie aussi pour la construction des tentes, la sécurité et la musique. » Concernant la vente en magasin, le président des brasseurs bavarois regrette qu’une caisse de bière (20 x 0,5 L) puisse être vendue 9,99 €. « C’est un coup dur pour nous et notre travail. Notre travail n’est évidemment plus valorisé. Cela met en danger l’existence de nos brasseries de taille moyenne. » Puis Georg Schneider se livre à un rapide comparatif avec d’autres pays européens où la bouteille de bière est vendue en pack de 6 ou même à l’unité. Selon lui, si l’on extrapolait le prix de vente, la caisse de 20 x 0,5 L devrait être vendue 80 €. « Chez Schneider nous vendons une caisse de bière entre 18 et 20 euros. Pour pouvoir fonctionner de manière raisonnable, une caisse de bière provenant d’une entreprise artisanale de taille moyenne devrait coûter entre 25 et 30 euros. »

Face à cette guerre des prix et à la lourdeur administratives, certaines brasseries sont contraintes d’arrêter leur activité. Ajoutons à cela la baisse de la consommation de bière dans le pays (145 L / an / habitant en 1976 vs. 89 L en 2021. Source : Statista) et la Bavière, qui comptait 768 brasseries en 1993, n’en compte plus que 624 en 2024. Soit 104 fermetures en 30 ans. Si la consommation de bière sans alcool est en forte progression, elle ne compense pas le manque à gagner. « Environ une bière sur neuf vendue par les brasseurs bavarois est désormais sans alcool » , précise Georg Schneider, qui souligne aussi un changement dans les habitudes de consommation de la génération Z.

Si l’année 2023 a été compliquée pour les brasseries bavaroises qui ont subi les mêmes hausses des coûts de production et de matières premières que leurs voisines des autres pays d’Europe, l’année 2024 s’annonce dans la même lignée : « Selon les chiffres de ventes disponibles jusqu’à présent, 2024 sera tout aussi mauvaise pour les brasseurs que 2023 » , assure Georg Schneider, qui ne blâme pas le mauvais temps : « C’est une excuse typique du brasseur pour justifier une baisse des ventes et qui n’est plus d’actualité. Le temps n’est jamais au rendez-vous, il fait soit trop chaud, soit trop froid. »

En conclusion, et pour relativiser, si l’année 2024 s’annonce encore difficile, la conjoncture ralentit la croissance mais ne la stoppe pas complètement. Selon l’Office fédéral de la statistique, les ventes des brasseries bavaroises ont augmenté de + 1,8 % au premier semestre 2024, pour atteindre 12 millions hL.