Depuis quelques jours, une avalanche de témoignages de victimes de comportements sexistes en entreprise, éclabousse le monde de la bière. Aux Etats-Unis, d’où cette vague est partie. Mais le Nouveau Monde n’en a certainement pas l’exclusivité.
C’est un événement sans précédent qui a touché le milieu brassicole américain il y a quelques jours. Brienne Allan, directrice de production chez Notch Brewing à Salem (Massachusetts) et présidente des Pink Boots de Boston a posé une simple question sur sa story Instagram : « Avez-vous déjà vécu une expérience sexiste sur votre lieu de travail ? » Les réponses ne se sont pas faites attendre ! Pas moins de 800 messages lui sont parvenus en quelques heures seulement.
Le nombre de retours a eu l’effet d’un véritable raz de marée et certaines têtes ont commencé à tomber après que leurs noms soient revenus à de très nombreuses reprises dans les témoignages (Dry & Bitter, Tired Hand, etc..). Le mouvement s’est emballé et Brienne est désormais assistée de plusieurs personnes pour trier les nombreux messages reçus chaque jour. Outre l’aide logistique, elle est aussi soutenue financièrement, par le biais de diverses cagnottes en ligne, en prévision d’éventuels procès. Des avocats se sont également proposés pour la défendre gracieusement. Cependant, les subtilités du droit américain pourraient lui permettre d’éviter tout procès en diffamation compte tenu du caractère d’utilité publique du mouvement et du fait que la très grosse majorité des messages publiés soit anonymes.
De très nombreuses brasseries ont dores et déjà apporté leur soutien et commencé à faire le ménage dans leurs rangs. D’autres ont pris position à travers des communiqués officiels, réagissant à cette déferlante de témoignages. En France, malgré quelques partages sur les réseaux et la publication d’articles par des blogs indépendants, il n’y a eu que très peu de réactions de la part des brasseries, associations ou collectifs brassicoles, qui sont attendus au tournant par les principales concernées. Le sujet est encore frais et suscite de nombreux débats, notamment à propos des dénonciations publiques sur les réseaux qui partagent l’opinion. Depuis longtemps, des groupes féministes comme Pink Boots travaillent d’arrache pied sur le sujet qui est pris très au sérieux.
Pour rappel, selon une récente étude parue dans Le Monde, 60 % des femmes en Europe disent avoir été ou être victime de violences sexistes au travail. Un chiffre alarmant qui met en exergue le fait que les entreprises doivent agir plus drastiquement afin de créer des environnements professionnels sains et sécurisés pour leur personnel féminin ou issu de minorités.
Le sujet n’est malheureusement pas nouveau et concerne tous les milieux. Bon nombre de mouvements de ce type sont nés en France tels que « Balance ton agency » pour le milieu de la communication et du marketing, « Paye ta truelle » pour l’archéologie ou encore « Paye ta shnek » , qui traite des violences sexistes de manière plus générales à travers le recueil de témoignages de tous bords.
Compte tenu de l’ampleur du mouvement, il y a fort à parier que nous devrions voir dans les jours à venir encore de nouveaux communiqués ou noms sortir du chapeau aux Etats-Unis. En France pour le moment, le sujet fait débat mais aucun mouvement de dénonciation comme celui de Allan n’a encore été mis en place ou annoncé, toutefois cela ne veut pas dire que ce type d’initiative ne pointera pas le bout de son nez. Affaire à suivre donc. ■
Marseillais passionné par l’univers brassicole, Gregory Giacalone est le fondateur du site The Beer Lantern et co-fondateur du podcast Les Bières narratives.